COVID-19 Mini-série Épisode #2 – Télémédecine & Droit : Recommandations et bonnes pratiques
Téléconsultations médicales: ce qu’il faut savoir. L’épidémie à laquelle la population fait face nécessite de trouver des solutions à distance, en particulier pour les questions médicales, le tri aux urgences et la pénurie de médecins disponibles pour répondre à des questions médicales et rassurer la population selon les symptômes décrits. Des réponses aux questions qu’il faut se poser pour l’utilisation de la télémédecine par les professionnels de la santé.
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Covid-19 Mini-séries juridiques Gabriel Avigdor, CIPP/E, Dr Ludovic Tirelli Spécialiste FSA en droit pénal / Avocats
Cette mini-série vise à fournir des lignes directrices et des recommandations aux organisations suisses durant l’incertitude liée à la propagation du nouveau coronavirus et aux récentes décisions des autorités suisses.
Les répercussions sur l’économie nous amènent à créer ces épisodes pour apporter des conseils pratiques et informations utiles pour les entreprises et organisations privées et publiques.
Le vendredi 13 mars 2020, se basant sur la loi fédérale sur les épidémies (LEp), le Conseil fédéral a décidé par ordonnance 2, d’interdire les cours présentiels dans les écoles. Le 16 mars, il révise son ordonnance 2 et fait usage de son pouvoir pour ordonner des mesures au niveau fédéral qualifiant l’épidémie de situation extraordinaire pour imposer des mesures à toute la Suisse (art. 7 LEp).
L’économie semble paralysée, les enseignants déploient des solutions d’e-Learning, les familles doivent trouver des solutions de garde, les employeurs oscillent entre flexibilité et pragmatisme. De leur côté, les professionnels de la santé et institutions de soins sont sur le pied de guerre pour garantir une couverture sanitaire suffisante et faire face à l’augmentation des cas. La télémédecine peut répondre à l’épidémie de #Covid-19, comme outil complémentaire à la médecine traditionnelle, notamment pour le tri en cas de doutes sur les symptômes. La télémédecine requiert toutefois quelques précautions élémentaires, tant d’un point vue scientifique, que de l’organisation technique et informatique. Nos recommandations dans cet épisode #2 de notre mini-série juridique Covid-19.
Q.1 Existe-t-il une loi qui règle l’art de la télémédecine en droit suisse ?
R.1: Non. Le droit suisse ne règle pas l’art de la médecine à distance de manière particulière. Ce sont les règles usuelles du droit médical et les grands principes du droit privé (CC et CO), administratif (LPMéd, lois cantonales sur la santé publique, etc.) et pénal (CP) qui continuent à s’appliquer. Toutefois, le droit suisse et la jurisprudence doivent s’appliquer et être interprétées dans un contexte particulier ; celui de l’exercice de la médecine à distance. Il s’agit de tenir compte des caractéristiques et limitations de cet art : limitation des sens, de contacts physiques (anamnèse sans ausculation ou palpation) ou visuels (téléphone), absence d’odeur, mauvaise qualité vidéo ou sonore, réactions émotionnelles limitées, même avec une bonne qualité vidéo, terrain d’expression limité.
Q.2 Quels sont les actes de télémédecine et qui peut les pratiquer ?
R.2.1: L’acte le plus fréquent est la téléconsultation, soit une consultation médicale à distance. Il peut s’agir d’une consultation simultanée (téléphone) ou en différé (e-mail, messagerie instantanée), laquelle consiste à conseiller un patient, lui prescrire des médicaments ou procéder à son anamnèse et diagnostic à distance.
R.2.2 Seul un médecin autorisé dans un canton peut pratiquer la télémédecine. Ce droit s’étend aux
médecins assistants et au personnel soignant, de cabinet ou hospitalier, directement instruit et surveillé, agissant sous l’entière responsabilité du médecin. Le même principe s’applique pour les sociétés de télémédecine, au sein desquelles seuls des médecins autorisés ou le personnel formé agissant sous sa responsabilité peuvent pratiquer. Au moins une année de pratique est recommandée.
Q.3 Les soins à distance sont-ils pris en charge par les assurances-maladie ?
R.3: En général, oui. Les prestations de soins doivent répondre à trois critères en étant présumées être appropriées, efficaces et économiques (art. 32 LAMal), sauf preuve contraire. Dans le cadre d’une pandémie telle que le coronavirus, ces critères seront très vraisemblablement réunis. Une téléconsultation pourra être remboursée si elle est fournie depuis ou vers l’étranger, notamment au vu des restrictions de vol et la fermeture des frontières. Les positions Tarmed (AF.10 pour le futur Tardoc) tiennent compte des téléconsultations médicales pour les prestations de base et cumulables.
Q.4 Comment respecter les règles de l’art médical en cas de pandémie ?
R.4: Respecter les règles de l’art médical, implique pour le médecin d’user de la même diligence qu’entre présents. En cas de doute, ou si les circonstances l’exigent, le médecin devra rediriger le patient pour une consultation ou vers l’hôpital le plus proche si la téléconsultation seule ne permet pas de garantir un traitement avec la même qualité qu’au cabinet médical. Dans le cadre de l’épidémie Covid-19, les connaissances scientifiques évoluent très rapidement et la population fait face à de nombreuses fausses informations circulant sur les réseaux sociaux qu’elle peut prendre pour fiables, Le télé-médecin a un grand rôle à jouer pour assurer un tri efficace des cas déférés ou non aux hôpitaux pour éviter leur surcharge. Dans un contexte d’épidémie, le médecin de premier recours se basera sur les toutes connaissances scientifiques actualisées pour le cas de Covid-19, émanantd’organisations internationales, de littérature scientifique, de l’OFSP et des médecins cantonaux.
Q.5 Secret médical et protection des données patient, comment faire ?
R.5: Avec l’utilisation des nouvelles technologies, le médecin doit aussi garantir le secret médical et la protection des données personnelles. Les données de santé sont considérées comme sensibles et méritent une protection particulière. Deux principes clés : ne collecter que les données nécessaires pour le but visé et supprimer les données une fois l’épidémie terminée. La CNIL en France a émis un décret pour faciliter l’accès aux solutions de télémédecine sans se rendre au cabinet d’un médecin et des règles de base pour protéger les données patients.
En Suisse, le Préposé fédéral à la protection des données (PFPDT) s’est prononcé et a fournis des conseils sur les données au cabinet médical; leur sécurité, les risques de l’utilisation du cloud, un guide complet sur la tenue du dossier médical et le secret médical. Pour rappel, toute violation du secret médical est passible de sanctions pénales (art. 321 du Code pénal ‘CP’). La transmission d’informations médicales à un confrère ou la consultation d’un épisode précédent de soins requiert le consentement du patient. En cas de risque pour la santé publique un intérêt public ou privé peut primer celui au droit à la sphère privée et permettre une collecte valable, pour préserver des intérêts vitaux (ce sujet sera traité séparément). Seuls les médecins doivent collecter des données détaillées.
Q.6 Quelles recommandations pour l’utilisation des nouvelles technologies ?
R6: En cas de stockage de données patients sur un support externe au cabinet (appareil mobile) : extraire ces données (Smartphone), les mettre au dossier médical et les supprimer du support ou de l’appareil mobile pour éviter une perte ou un accès indû aux données médicales. Attention, les entreprises tierces et les prestataires informatiques ne garantissent pas le secret médical. Crypter les pièces jointes, utiliser un e-mail sécurisé, garder les données en Suisse et éviter le cloud.